par Guillaume Charent, Avocat, former solicitor, cabinet Flichy Grangé Avocats
La notion de co-emploi a connu, sous l’impulsion de la Cour de cassation, un rétrécissement tel qu’il a été envisagé qu’elle disparaisse purement et simplement de la jurisprudence. Certains arrêts de la Cour de cassation tendent néanmoins à montrer que la notion est désormais réservée à des situations extrêmes d’immixtion dans la gestion économique ou sociale de l’employeur contractuel.
Exposé du litige :
La société Imprimerie Georges Frère, créée en 1954 intervenait dans le secteur de l’imprimerie dite offset et s’était spécialisée dans le domaine de l’impression industrielle de labeur publicitaire et réalisait essentiellement des impressions publicitaires et des imprimés commerciaux pour diverses sociétés (La Redoute, 3 Suisses, Yves Rocher…). En 1989 elle est devenue la filiale de la société Mercator Press NV laquelle assure l’activité de production du groupe Mercator Press, un groupe belge spécialisé dans l’impression Offset et composé de la société Mercator Press NV et de la société Mercator Press Sales NV, société holding qui détient elle-même 99 % du capital de la société Mercator Press.
Depuis 2010, la totalité du capital social de la société Imprimerie Georges Frère est détenu par la société Mercator Press NV. Une procédure de redressement judiciaire ayant été ouverte le 21 mars 2011 à l’égard de la société Imprimerie Georges Frère, ensuite convertie le 14 a vril 2011, en liquidation judiciaire, maître Depreux, en sa qualité de liquidateur, a licencié le 28 avril 2011, les 38 salariés pour motif économique. Le liquidateur, par acte délivré le 10 avril 2014, a également assigné les sociétés Mercator Press NV et Mercator Press Sales NV en responsabilité pour insuffisance d’actif de la filiale, les tenant pour dirigeants de fait de celle-ci. Par jugement du 25 avril 2017, le tribunal de commerce de Lille a homologué l’accord transactionnel conclu le 31 janvier 2017 entre le liquidateur et les sociétés Mercator Press et Mercator Press Sales lesquelles se sont engagées à verser la somme de 400 000 €. 29 des salariés licenciés, dont X, salarié de la société Imprimerie Georges Frère depuis le 22 novembre 1997, en qualité d’électromécanicien, ont saisi, le 21 mars 2012, la juridiction prud’homale de demandes formées à l’encontre des sociétés Mercator Press NV et Mercator Press Sales NV pour obtenir, à titre principal, paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en se prévalant de la qualité de co-employeurs des dites sociétés et subsidiairement la réparation d’un préjudice lié à la perte d’une chance de conserver leur emploi, à raison des fautes délictuelles commises par ces sociétés.
Par jugements du 14 avril 2015, le conseil de prud’hommes de Tourcoing après avoir considéré les sociétés Mercator Press et Mercator Press Sales comme co-employeurs, les a condamnées à payer à chacun des salariés des dommages et intérêts pour licenciementsans cause réelle et sérieuse outre 200 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civ ile et à rembourser à l’association CGEA de Lille, agissant sur délégation de l’AGS les sommes avancées aux salariés au titre de la garantie des salaires, et a mis hors de cause le liquidateur ;
Par courrier électronique adressé au greffe par le RPVA, le 12 mai 2015, maître Policella pour le compte de X, a relevé appel de cette décision (n° 15/01771)