Bonjour à tous,
A l’occasion de l’interview qu’il a donnée hier, le Président de la République a évoqué le dispositif d’activité partielle de longue durée (APLD), présenté comme un « plan anti-licenciements ».
Ce dispositif, issu de la loi du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, doit faire l’objet d’un décret, dont nous avons pu consulter le projet.
Il peut être résumé de la manière suivante :
- Quelles sont les entreprises concernés ? – Les entreprises confrontées à une réduction d’activité durable qui n’est pas de nature à compromettre leur pérennité. Autrement dit, l’APLD n’a pas vocation à être une forme de « coma artificiel » pour les entreprises en grande difficulté.
- Accord collectif d’entreprise – L’APLD peut être mise en place par accord collectif d’entreprise (ou d’établissement ou de groupe).
- Accord collectif de branche étendu et document unilatéral – L’APLD peut être mise en place sur le fondement d’un accord collectif de branche étendu, décliné sous forme d’un document unilatéral, adopté après consultation du CSE, si l’entreprise en dispose.
- Rôle de l’administration – L’accord collectif d’entreprise ou le document unilatéral sont transmis à l’administration pour validation (accord) ou homologation (document unilatéral), la distinction rappelant celle applicable en matière de plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). Le contrôle de l’administration porte sur la procédure d’élaboration et le contenu de l’accord ou du document unilatéral. La décision de l’administration est rendue sous 15 jours (validation d’un accord) ou 21 jours (homologation d’un document unilatéral), l’absence de décision au terme de ces délais valant décision favorable. La décision de l’administration est rendue pour une période de six mois, éventuellement renouvelable.
- Contenu obligatoire de l’accord d’entreprise – L’accord collectif doit faire, en préambule, le diagnostic de la situation économique de l’entreprise. Il doit ensuite déterminer les activités et salariés concernés par le dispositif, la réduction de l’horaire de travail susceptible d’intervenir au titre du dispositif, les engagements en terme de maintien de l’emploi et de formation professionnelle pris par l’employeur en contrepartie du chômage indemnisé de certaines heures normalement travaillées, les modalités d’information des représentants du personnel et la durée d’application du dispositif.
- Contenu facultatif de l’accord d’entreprise – L’accord collectif peut également définir les conditions dans lesquelles les dirigeants, mandataires sociaux et actionnaires participent aux efforts demandés aux salariés (ce qui n’est pas sans évoquer le contenu facultatif des accords de performance collective), les conditions de mobilisation des congés payés et du CPF des salariés pour retarder ou limiter le recours à l’APLD, les moyens de suivi de l’accord par les organisations syndicales.
- Contenu de l’accord de branche et du document unilatéral – Le contenu obligatoire de l’accord de branche, complété par le document unilatéral, couvre les mêmes thèmes que ceux de l’accord d’entreprise. Ils peuvent aborder les mêmes thèmes facultatifs.
- Absence de recours individualisé au dispositif – Contrairement au dispositif d’activité partielle tel qu’il a été assoupli pendant la période de crise sanitaire, il ne peut pas être recouru de manière individualisée à l’APLD. Autrement dit, si l’APLD peut concerner certaines catégories de salariés (ceux d’un établissement, d’un service, d’une équipe…), elle ne peut pas concerner tel salarié plutôt que tel autre.
- Réduction de l’horaire de travail – La réduction de l’horaire de travail imposée au titre de l’APLD est de 40% maximum par salarié concerné. Un dépassement peut toutefois être autorisé par l’administration « dans des cas exceptionnels résultant de la situation particulière de l’entreprise ».
- Indemnité d’APLD (versée par l’employeur au salarié) – Comme en matière d’activité partielle « classique », le salarié placé en APLD reçoit une indemnité égale à 70% de sa rémunération brute. Une limite d’assiette de 4,5 SMIC est toutefois appliquée.
- Allocation d’APLD (remboursée par l’Etat à l’employeur) – L’Etat rembourse à l’employeur les indemnités versées aux salariés dans une certaine limite. Cette limite est de 60% ou 56% de la rémunération brute horaire des salariés concernés selon que l’APLD a lieu dans le cadre d’un accord transmis à l’administration respectivement avant ou après le 1er octobre 2020.
- Remboursement par l’employeur à l’Etat des allocations d’APLD en cas de licenciement pour motif économique – Si, pendant la durée de l’accord, l’employeur licencie pour motif économique un salarié placé en APLD ou s’il licencie un salarié en méconnaissance des engagements pris en matière de maintien de l’emploi, il doit rembourser à l’Etat les allocations d’APLD correspondantes.
- Bilan du dispositif – L’employeur doit adresser à l’administration, au moins tous les six mois et avant toute demande de renouvellement, un bilan de l’application de l’accord ou du document unilatéral.
- Durée du dispositif – En l’état actuel des textes, le dispositif d’APLD est accessible jusqu’au 30 juin 2022 (date de transmission des accords ou documents unilatéraux à l’administration du travail).
- Cumul avec l’activité partielle « classique » – L’APLD ne peut concerner, au cours d’une même période de temps, des salariés placés en activité partielle « classique ». En revanche, une entreprise qui a recours à l’APLD peut aussi recourir, pour d’autres salariés, à l’activité partielle « classique ».
Nous ne manquerons pas de revenir vers vous lorsque le décret définitif sera adopté, en particulier s’il s’éloigne du projet que nous avons pu consulter.
D’ici là, nous demeurons à votre disposition pour toute précision.
Alix Frileux
Avocat associé